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Rubeus Hagrid — Et les funérailles de Dumbledore ? demanda Harry, parlant enfin.
— Eh bien, dit le professeur McGonagall, la voix soudain tremblante, le ton radouci, je… je sais que c’était la volonté de Dumbledore de reposer ici, à Poudlard…
— Cette volonté sera donc respectée ? interrogea Harry d’un ton féroce.
— Si le ministère le juge opportun, répondit le professeur McGonagall. Aucun autre directeur, ni directrice, n’a jamais été…
— Aucun autre directeur, ni directrice, n’a jamais autant donné à cette école, gronda Hagrid.
— Poudlard doit devenir la dernière demeure de Dumbledore, assura le professeur Flitwick.
— Absolument, approuva le professeur Chourave.
— Dans ce cas, reprit Harry, vous ne devriez pas renvoyer les élèves chez eux avant l’enterrement. Ils voudront lui dire…
Le dernier mot s’étouffa dans sa gorge mais le professeur Chourave se chargea de le prononcer à sa place :
— … adieu.
— Hagrid, quelqu’un vous a attaqué ! dit Ron.
— Pour la dernière fois, c’est rien du tout ! assura Hagrid d’un ton sans réplique.
— Vous diriez que ce n’est rien si l’un d’entre nous venait vous voir avec une livre de steak haché à la place du visage ? demanda Ron.
— Évidemment qu'on a envie de vous voir ! dit Harry en regardant Hagrid. Vous ne pensez quand même pas que ce qu'a écrit cette grosse truie de Skeeter... Excusez-moi, professeur, ajouta-t-il précipitamment en se tournant vers Dumbledore.
— J'ai eu un soudain accès de surdité et je n'ai aucune idée de ce que tu viens de dire, Harry, répondit Dumbledore en se tournant les pouces, les yeux levés vers le plafond.
— Harry Potter, dit-il très doucement.
Sa voix aurait pu se confondre avec le crépitement du feu.
— Le Survivant.
Les Mangemorts ne bougeaient pas. Ils attendaient. Tout attendait autour d’eux. Hagrid se débattait
et Bellatrix haletait. Inexplicablement, Harry songea à Ginny, à son regard flamboyant, à la sensation de
ses lèvres contre les siennes…
Voldemort avait levé sa baguette, la tête toujours penchée de côté, comme un enfant en proie à la
curiosité, se demandant ce qui arriverait s’il poussait les choses plus loin. Harry soutenait le regard des
yeux rouges. Il voulait que tout se passe vite, pendant qu’il pouvait encore tenir debout, avant qu’il ne
perde le contrôle de lui-même, avant qu’il ne trahisse sa peur…
Il vit alors la bouche remuer, puis il y eut un éclair de lumière verte et tout disparut.
Au bout d’une heure environ, Hagrid et Slughorn commencèrent à porter des toasts extravagants : à Poudlard, à Dumbledore, au vin des elfes et à…
— Harry Potter ! beugla Hagrid.
Il fit couler du vin sur son menton en vidant sa quatorzième chope de la taille d’un seau.
— Oui, c’est ça, s’écria Slughorn d’une voix un peu pâteuse. Parry Otter, l’Elu, le Survi… heu… quelque chose dans ce genre-là, marmonna-t-il, et il vida sa chope à son tour.
Le banquet avait commencé depuis une vingtaine de minutes lorsque Hagrid se faufila à l'intérieur de la salle en passant par une porte située derrière la table des professeurs. Il se glissa à sa place et salua Harry, Ron et Hermione en agitant une main entourée de bandages.
— Les Scroutts vont bien, Hagrid ? lança Harry depuis la table des Gryffondor.
— En pleine forme, répondit Hagrid d'un air ravi.
— Rien d'étonnant, dit Ron à voix basse. Apparemment, la nourriture qui leur convient le mieux, ce sont les doigts de Hagrid.
Il avait vu Hagrid offrir un ours en peluche à un redoutable bébé dragon, susurrer des chansons à d’énormes scorpions dotés de dards et de ventouses, essayer de raisonner le géant féroce qu’était son demi-frère, mais parmi toutes ses passions pour les monstres, la plus incompréhensible était sans doute celle-ci : Aragog, la gigantesque araignée parlante, qui vivait au coeur de la Forêt interdite et à laquelle Ron et lui avaient échappé de justesse quatre ans auparavant.
— Est-ce que… est-ce qu’on peut faire quelque chose ? demanda Hermione sans prêter attention aux grimaces et aux hochements de tête frénétiques de Ron.
— Je ne crois pas, Hermione, sanglota Hagrid en essayant de contenir le flot de ses larmes. Tu sais, le reste de la tribu… la famille d’Aragog… ils deviennent un peu bizarres maintenant qu’il est malade… un peu agités…
— Oui, je crois qu’on avait déjà remarqué cet aspect de leur personnalité, dit Ron à mi-voix.
— Je pense qu’il ne serait pas prudent pour quelqu’un d’autre que moi de s’approcher d’eux en ce moment, conclut Hagrid.
— Oh, Hagrid, pourquoi l’avez-vous amené, s’il ne voulait pas venir ? N’aurait-il pas été plus heureux avec son propre peuple ?
— Ils n’arrêtaient pas de le brutaliser, Hermione, dit Hagrid. Il est si petit !
— Petit ? répéta Hermione. Petit ?
— Il l’a cru beaucoup plus vite que moi – quand vous lui avez annoncé qu’il était un sorcier, dit Harry. Moi, au début, je ne croyais pas Hagrid quand il me l’a révélé.
— Oui, Jedusor se montrait tout disposé à accepter l’idée qu’il était – pour employer ses propres termes – « quelqu’un d’exceptionnel », dit Dumbledore.
— Et… saviez-vous, à l’époque ? demanda Harry.
— Savais-je que je venais de rencontrer le plus dangereux mage noir de tous les temps ? Non, je n’avais pas la moindre idée de ce qu’il allait devenir. Mais il est certain qu’il m’intriguait. Je suis rentré à Poudlard avec l’intention de garder un oeil sur lui, ce que j’aurais fait de toute façon, étant donné qu’il était seul et sans amis. Mais je sentais déjà que c’était nécessaire autant pour le bien des autres que pour le sien.
— J’étais avec Graup, répondit Hagrid d’un ton réjoui. Je n’ai pas vu passer le temps. Il habite un nouvel endroit là-haut dans les montagnes, c’est Dumbledore qui a arrangé ça – une belle grande caverne. Il y est beaucoup plus heureux que dans la forêt. On a bien bavardé.
— Vraiment ? dit Harry en prenant garde de ne pas croiser le regard de Ron.
La dernière fois qu’il avait vu le demi-frère de Hagrid, un redoutable géant doué d’un talent particulier pour déraciner les arbres, son vocabulaire comprenait cinq mots, dont deux qu’il était incapable de prononcer correctement.
— Oh oui, il a beaucoup progressé, assura Hagrid avec fierté. Tu serais étonné. Je crois que je vais le former pour être mon assistant.
Ron étouffa une exclamation qu’il parvint à faire passer pour un éternuement.