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Harry Potter et les Reliques de la MortChapitre 35 - King's Cross — Tu étais le septième Horcruxe, Harry, l’Horcruxe qu’il n’avait pas eu l’intention de créer. Il avait rendu son âme si instable qu’elle s’est brisée quand il a commis ces actes d’une malfaisance indescriptible, le meurtre de tes parents, la tentative d’assassinat sur un enfant. Mais ce qui restait de lui lorsqu’il s’est échappé de cette pièce ce soir-là était encore plus diminué qu’il ne le croyait. Il a laissé derrière lui plus que son corps. Il a aussi laissé une partie de lui-même accrochée à toi, la victime désignée qui avait survécu.
L’endroit était vide. Il était la seule personne présente, en dehors de…
Il eut un mouvement de recul. Il venait de voir la chose qui produisait tous ces bruits. Elle avait la forme d’un petit enfant nu, recroquevillé par terre, la peau à vif, rêche, comme écorchée, et reposait,
frissonnante, sous le siège où on l’avait laissée, rejetée, cachée à la vue, luttant pour respirer.
Harry en avait peur. Même si la créature était fragile, toute petite, blessée, il ne voulait pas s’en approcher. Il s’avança cependant un peu plus, prêt à bondir en arrière à tout moment. Bientôt, il en fut suffisamment proche pour la toucher, mais ne put se résoudre à le faire. Il se sentit lâche. Il aurait dû essayer de la réconforter, mais il éprouvait de la répulsion.
— Tu ne peux pas l’aider.
Il pivota sur ses talons. Albus Dumbledore marchait vers lui, droit et fringant, vêtu d’une longue robe bleu nuit.
— Harry.
Il ouvrit largement les bras et ses mains étaient toutes deux blanches et intactes.
— Tu es décidément un garçon merveilleux ! Un homme courageux, très courageux ! Viens avec moi.
— Mais si Voldemort a utilisé le sortilège d’Avada Kedavra, reprit Harry, et que, cette fois, personne
n’a succombé à ma place… comment puis-je être encore vivant ?
— Je crois que tu le sais, répliqua Dumbledore. Repense au passé. Souviens-toi de ce qu’il a fait
dans son ignorance, sa cupidité, sa cruauté. [...]
— Il a pris mon sang, dit Harry.
— Exactement ! s’exclama Dumbledore. Il a pris ton sang et s’en est servi pour se reconstruire un
corps vivant ! Ton sang circule dans ses veines, Harry. La protection de Lily se trouve en vous deux. Il
te rattache à la vie tant que lui-même est vivant !
— Sa connaissance de la réalité, cependant, est demeurée tristement incomplète, Harry ! Lorsque quelque chose paraît sans valeur à Voldemort, il ne prend pas la peine de s’y intéresser. Voldemort ne sait rien des elfes de maison, des contes pour enfants, de l’amour, de la loyauté, de l’innocence et il n’y comprend rien.Rien. Le fait qu’ils puissent posséder un pouvoir qui dépasse le sien, un pouvoir hors de
la portée de toute magie, est une vérité qu’il n’a jamais saisie.
— Et vous le saviez ? Vous l’avez su… depuis le début ? [Harry]
— Je l’ai deviné. Mais généralement, je devine bien, répondit Dumbledore d’un ton joyeux.
— Sans le vouloir, comme tu le sais maintenant, Lord Voldemort a doublé le lien entre vous deux quand il a repris une forme humaine. Une partie de son âme était toujours attachée à la tienne et, pensant qu’il allait se renforcer, il a introduit en lui une parcelle du sacrifice de ta mère. S’il avait pu comprendre exactement la terrible puissance de ce sacrifice, peut-être n’aurait-il pas osé toucher à ton sang… Mais s’il avait été capable de comprendre, il ne serait pas Lord Voldemort, et n’aurait peut-être jamais assassiné personne.
— Pourras-tu jamais me pardonner ? demanda-t-il. Pourras-tu me pardonner de n’avoir pas eu
confiance en toi ? De ne pas t’avoir mis au courant ? Harry, j’avais simplement peur que tu échoues comme moi-même j’avais échoué. J’avais peur que tu répètes les mêmes erreurs que moi. J’implore ton pardon. Depuis un certain temps, maintenant, je sais que tu es le meilleur de nous deux.
— Les reliques, les reliques, murmura Dumbledore. Un rêve que poursuit l’homme avec acharnement !
— Mais elles sont réelles ! [Harry]
— Réelles et dangereuses, un leurre pour les sots, répliqua Dumbledore. Et sot, je l’étais tellement. [...] Maître de la Mort, Harry, maître de la Mort ! Étais-je finalement meilleur que Voldemort ?
— J’étais doué. J’étais brillant. Je voulais m’échapper. Je voulais étinceler. Je voulais la gloire.
Comprends-moi bien, poursuivit-il – une expression de douleur passa sur son visage et il parut à nouveau très âgé. Je les aimais. J’aimais mes parents, j’aimais mon frère et ma soeur, mais j’étais égoïste, Harry, plus égoïste que tu ne peux l’imaginer, toi qui es remarquablement désintéressé.
Si bien que, quand ma mère est morte et que la responsabilité m’est revenue de m’occuper d’une soeur diminuée et d’un frère indiscipliné, je suis rentré dans mon village avec de la colère et de l’amertume. Je me voyais pris au piège, ma vie était gâchée ! Et puis, bien sûr, il est arrivé…
Dumbledore regarda à nouveau Harry dans les yeux.
— Grindelwald. Tu ne peux pas imaginer à quel point ses idées m’ont captivé, Harry, m’ont enflammé. Les Moldus asservis. Nous, les sorciers, triomphants. Grindelwald et moi, les jeunes chefs
glorieux de la révolution.
— Pendant ce temps, on m’avait offert le poste de ministre de la Magie, non
pas une mais plusieurs fois Naturellement, j’ai refusé. J’avais appris qu’il valait mieux ne pas me confier le pouvoir.
— Mais vous auriez été bien, bien meilleur que Fudge ou que Scrimgeour ! s’exclama Harry.
— Vraiment ? demanda Dumbledore d’un ton lourd. Je n’en suis pas si sûr. J’avais donné la preuve, dans mes jeunes années, que le pouvoir était ma faiblesse et ma tentation. C’est une chose curieuse à
dire, Harry, mais peut-être que les plus aptes à exercer le pouvoir sont ceux qui ne l’ont jamais recherché. Ceux qui, comme toi, reçoivent la responsabilité du commandement et endossent ce manteau parce qu’ils le doivent, puis s’aperçoivent, à leur grande surprise, qu’ils le portent très bien.